Un été impressionniste ou Vogue, vogue sur ton fragile esquif...

Pour lire un peu, je m'étais déplacée sous le couvert des arbres bordant le cours d'eau. Dans la quiétude d'un après-midi tiède et caressant rompue seulement par le cri d'écureuils roux qui se chamaillent ou par les exclamations joyeuses de rares baigneuses, je me prenais à me laisser absorber par les reflets de la lumière sur l'eau, miroitante, facettée, impressionniste et à contempler, ravie, le discret frisson des fougères à mes pieds, avant de se soumettre, elles aussi, à la fascination de l'eau.  

J'étais assise près des cascades, là ou les gens viennent l'après midi, quand je remarquai un garçon d'environ 12 ans qui semblait être fasciné par l'arbre au-dessus de moi. Tu regardes l'arbre, lui dis-je? En me jetant seulement un regard, il ne répondit pas en continuant de contempler le saule. Il s'avança un peu vers moi, l'air un peu curieux. C'est beau ici qu'il me déclara. À mon tour de ne pas répondre. Et il me posa des questions sur l'eau: C'est profond là-bas? Non, pas vraiment, lui dis-je. Il y a une grande langue de sable. Pour des enfants, peut-être, ajoutai-je. Et là qu'il me dit? Ne se contentant pas des coups d'oeil que l'on jette habituellement pour se familiariser avec un endroit, il regardait avec attention. Puis, après une minute ou deux qui m'ont paru longues: Y a un lapin là, déclara-t-il tout à coup. Surprise, je croyais bien apercevoir une tache blanche sur l'ilot de sable, une tache qui se mouvait effectivement par à-coups, comme un lapin. Je me levai de ma chaise et m'approchai, accompagnée du charmant garçon qui me suivait: sur l'îlot, un autre jeune garçon prenait un lapin blanc qu'il déposa dans le bas ouvert d'une toute petite cage de transport pour animal qu'il fit flotter sur l'eau avec son étonnant passager.

Imaginez-vous cela: la toute petite cage de transport ouverte avec ce petit lapin blanc sagement assis à son bord voguant doucement sur les eaux. Surprenante, inopinée et charmante image.

Rassurez-vous, le garçon est allé le récupérer après que la cage en question se soit mise à prendre l'eau et que le brave petit lapin se soit mis à la nage. Lui aussi avait droit à son aventure estivale.  

Lorsque je me décidai à tourner la page sur cette agréable compagnie - les garçons étant accompagnés par leurs parents roumains - et sur ce charmant tableau, je traversais le ponton lorsque j'entendis un petit Madame! Je me retournai pour voir mon gentil  contemplatif me héler d'un geste timide de la main. Alors, reconnaissante, je lui fis un signe de la main que je voulus ample et généreux.